La détresse maternelle psychologique représente un problème de santé publique majeur. La dépression toucherait environ 18% des femmes enceintes, et l’anxiété concernerait de 14 à 54% des femmes enceintes. Avec des répercussions pour la mère, ces troubles de la santé mentale, (la santé mentale étant définie par l’OMS comme “un état de bien-être dans lequel une personne peut se réaliser, surmonter les tensions normales de la vie, accomplir un travail productif et fructueux et contribuer à la vie en communauté”) peuvent notamment augmenter le risque d’avortement spontané, de pré-éclampsie ou d’accouchement prématuré. Chez l’enfant, nous savons aujourd’hui que le stress et la dépression chez la mère peuvent être à l’origine de troubles de l’apprentissage ou du comportement. Mais en connaît-on les raisons ? Afin d’identifier les facteurs de risque prédictifs de ces troubles chez l’enfant, une étude, ayant recours à l’imagerie par résonance magnétique a étudié le développement neurologique de 119 fœtus, entre la 24e et la 40e semaine de gestation.
Des symptômes à ne pas minimiser
Courants lors de la grossesse, les changements d’humeur, la fatigue, les troubles du sommeil peuvent aussi être symptomatiques d’une dépression, lorsqu’ils sont plus intenses et durent plus longtemps que la moyenne. Peuvent s’ajouter à ces symptômes une tristesse constante, de l’irritabilité, de l’anxiété, une perte d’intérêt pour ses activités habituelles, un sentiment de désespoir, de culpabilité, un manque d’appétit, une incapacité à bien dormir, des pensées macabres. Concrètement, cela peut se traduire par une absence aux rendez-vous médicaux de suivi prénatal, une alimentation incorrecte, la consommation de substances illicites. Les professionnels de santé auront un rôle particulièrement important à jouer, afin de pouvoir orienter au mieux la patiente, en fonction de la sévérité de la dépression. Faire de l’exercice, du yoga, suivre un régime alimentaire sain, consulter un psychologue, prendre des antidépresseurs, sont autant de solutions qui pourront être décidées avec le médecin, avec la participation éventuelle du partenaire.
Une découverte inédite
Pour cette étude, entre janvier 2016 et avril 2019, un échantillon de 119 femmes enceintes a été constitué, toutes à bas risque obstétrical et menant une gestation normale. Avec un âge moyen de 34,46 ans, un niveau scolaire d’études secondaires, diplômées à 83% de l’université, travaillant à 84%, les participantes sont considérées de haut niveau socio-économique et professionnel, sans problèmes apparents majeurs.
Entre la 20° et la 40° semaine de gestation, deux IRM du cerveau du fœtus ont été pratiquées, suite à un questionnaire administré aux futures mères évaluant leur niveau de stress et d’anxiété.
Ainsi, dans le groupe, 27% des femmes présentaient un score élevé pour le stress, 26% pour l’anxiété, 11% pour la dépression. Au final, un lien a été trouvé entre une symptomatologie anxieuse chez la mère et une réduction du volume de l’hippocampe foetal gauche (partie du cerveau chargée de la mémoire et de l’apprentissage) chez les fœtus, ainsi qu’une augmentation des circonvolutions du lobe frontal (intervenant dans la planification, le langage et le mouvement volontaire).
Quant aux mécanismes par lesquels des troubles psychologiques maternels peuvent influer sur le développement du cerveau fœtal, ceux-ci restent très imprécis et plusieurs hypothèses existent. Avec des progrès restant à faire dans l’interprétation des IRM foetales, une étude sur un plus large échantillon de patientes pourrait venir enrichir ces données. Par ailleurs, il sera nécessaire de suivre cliniquement ces enfants à naître et de réaliser des IRM post natales afin de vérifier les conclusions de l’étude et d’observer leurs conséquences.
Juliette S., Rédactrice scientifique
– Grossesse : la dépression prénatale. NAÎTRE ET GRANDIR. Consulté le 11 mars 2020.
– La santé mentale : renforcer notre action. WHO INT. Consulté le 11 mars 2020.