Les benzodiazépines Benzodiazépines dans le traitement des l’anxiétéreprésentent une classe de médicaments principalement utilisés dans le traitement de l’anxiété. En septembre dernier, la Food and Drug Administration a mis en garde contre les nombreux risques liés à leur emploi et une récente mise au point publiée dans la revue médicale JAMA exhorte les professionnels de santé à une utilisation plus raisonnée.
Benzodiazépines : une efficacité certaine contre l’anxiété…
Les benzodiazépines représentent une classe de médicaments indiqués en cas de manifestations anxieuses et/ou invalidantes ayant un retentissement important sur le fonctionnement quotidien et la qualité de vie du patient. Ces manifestations anxieuses peuvent être liées à un trouble anxieux (trouble anxieux généralisé, trouble panique, phobie sociale, trouble obsessionnel compulsif, état de stress post-traumatique) ou liées à un trouble de l’adaptation (ensemble de syndromes de réponse au stress apparaissant après un événement de vie difficile).
À savoir ! Les benzodiazépines ont une action directe au niveau du système nerveux central, ce qui leur confère des propriétés anxiolytiques, hypnotiques, myorelaxantes et anti-convulsivantes.
Ces molécules (parmi lesquelles l’alprazolam, le lorazépam ou encore le diazépam) sont soumises à des règles de prescription strictes :
- Durée de traitement devant être la plus courte possible
- Durée de prescription limitée à 12 semaines maximum
- Conditionnements avec le moins d’unités de prises privilégiés
- Dose minimale efficace adaptée à la situation clinique des patients
À savoir ! Les benzodiazépines sont efficaces sur une courte période et ne traitent pas les causes de l’anxiété. Elles sont responsables de nombreux effets indésirables aux conséquences parfois graves. Pour cela, ces molécules ne doivent pas être banalisées.
Les benzodiazépines ont démontré une réelle efficacité dans la prise en charge de formes variées d’anxiété. Une méta-analyse de 58 essais cliniques a d’ailleurs confirmé que les benzodiazépines étaient plus efficaces qu’un placebo chez les sujets présentant des scores d’anxiété élevés, pour des durées de traitement réduites. La Haute Autorité de Santé a même estimé que le service médical rendu (SMR) par les benzodiazépines anxiolytiques s’avérait important dans le traitement des manifestations anxieuses sévères et/ou invalidantes. Mais l’emploi de ces molécules est loin d’être anodin ni sans risque.
À savoir ! Le service médical rendu par un médicament (SMR) correspond à son intérêt en fonction de ses performances cliniques et de la gravité de la maladie traitée. La Commission de la Transparence de la HAS évalue le SMR (important/modéré/faible ou insuffisant) pour que le médicament soit pris en charge par la collectivité.
…mais de nombreux risques liés à une utilisation inappropriée
En Septembre dernier, la Food and Drug Administration (agence américaine des produits alimentaires et médicamenteux) a souhaité attirer l’attention « sur les risques sérieux d’abus, d’addiction, de dépendance physique et de réactions de sevrage » liés à l’utilisation des benzodiazépines. Il faut dire que cette classe thérapeutique fait l’objet de nombreuses utilisations inappropriées (sans prescription médicale, avec des posologies ou des durées inadaptées…). Une enquête menée aux Etats-Unis entre 2015 et 2016, a en effet révélé que la proportion d’usages inappropriés des benzodiazépines s’élevait à 17% et qu’ils concernaient le plus souvent des personnes jeunes (entre 18 et 25 ans). Elle exhorte donc les professionnels de santé à délivrer la dose efficace la plus faible possible, durant le temps le plus court possible et avec une décroissance lente.
À savoir ! L’utilisation prolongée des benzodiazépines peut conduire à une augmentation des posologies, une consommation de plus en plus inadaptée, une dépendance et des réactions de sevrage. Les femmes, les personnes âgées, les adolescents, les personnes présentant des troubles de santé mentale ou prenant des antidépresseurs sont particulièrement concernés.
Dans sa mise en garde, la FDA a également souhaité alerter sur le risque d’une co-administration avec d’autres molécules sédatives (comme les opiacés), qui augmente de façon considérable le risque de décès par surdosage. Avec près de 2 millions d’adultes américains sous co-prescription en 2014, les Etats-Unis ont en effet pu constater une hausse non négligeable des décès liés à la prise de benzodiazépines.
Si cette mise en garde de la FDA est justifiée, elle doit cependant s’inscrire dans une démarche thérapeutique centrée sur le patient, comme l’explique Matthew E. Hirschtritt dans une mise au point récemment parue dans la revue médicale JAMA (Journal of the American Medical Association).
Les benzodiazépines dans le traitement des l’anxiété : une nécessité d’une utilisation plus raisonnée
Dans cette publication, l’auteur a détaillé le rapport bénéfices/risques des benzodiazépines et présenté les conséquences éventuelles de l’avis de la FDA tout en proposant des pistes de réflexion quant à une utilisation plus rationnelle de ces molécules. Il en ressort que les professionnels de santé doivent avoir recours aux benzodiazépines de façon prudente et surtout appropriée. Avant de prescrire de telles molécules à leurs patients, de nombreux paramètres doivent être pris en compte comme par exemple un âge avancé, la présence de troubles cognitifs, le risque de chutes ou encore la prise concomitante d’opiacés. La possibilité d’un traitement alternatif doit également être évaluée.
De plus, si les praticiens doivent réduire leurs prescriptions de benzodiazépines, ils doivent le faire de façon concertée. Car les besoins et facteurs de risques particuliers de leurs patients sont à prendre en compte. Lorsqu’un traitement est en cours, la posologie doit impérativement être diminuée de manière progressive. Cette démarche semble applicable à de nombreux patients anxieux pouvant bénéficier en soutien d’un traitement par antidépresseurs ou de diverses formes de psychothérapie. Mais s’agissant des patients avec une anxiété résiduelle mal contrôlée, le risque qu’ils se tournent vers la consommation de cannabis ou d’autres drogues dont les effets délétères dépassent ceux des benzodiazépines demeure bien réel.
A la fois source de bénéfices et d’effets secondaires, l’utilisation des benzodiazépines n’est pas à prendre à la légère. Les médecins ont donc la délicate responsabilité de sélectionner l’option thérapeutique la plus efficace et la moins risquée pour leurs patients. La mise à jour des recommandations d’utilisation et des avertissements liés à l’usage des benzodiazépines doit ainsi leur inspirer prudence et modération !
Déborah L., Docteur en Pharmacie
– Quelle place pour les benzodiazépines dans l’anxiété . has-sante.fr. Consulté le 1er mars 2021.